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Courrier à l’État de l’Inter-Asso Goutte d’Or.

L’Inter-Asso Goutte d’Or a souhaité alerter les pouvoirs publics sur la situation très problématique du sud du quartier de la Goutte d’Or. Après une réunion avec le maire et ses adjoints, celle-ci a décidé d’envoyer un courrier à l’État, au président de la République, au premier ministre et aux ministres potentiellement concernés ainsi qu’au Préfet de Police de Paris que nous reproduisons ici :

 

Monsieur le Président de la République,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le Préfet de Police de Paris
Nous, associations réunies au sein de l’Inter-Associatif Goutte d’Or, souhaitons vous alerter sur la situation très dégradée du sud du quartier, qui subit depuis plusieurs mois un cumul de difficultés pesant sur les habitants et sur celles et ceux qui travaillent sur place. En cohérence avec vos engagements à réduire les inégalités, à éviter toute rupture de services publics et à rétablir la cohésion du territoire national, nous vous demandons de mettre en oeuvre les mesures qui s’imposent sur les plans social, sanitaire et éducatif, ainsi qu’en termes de rétablissement de l’ordre public, afin que le quartier redevienne vivable et cesse d’être vécu par ses riverains et perçu à l’extérieur comme un îlot que les pouvoirs publics laissent se dégrader et dériver à l’abandon.
Les habitants et les acteurs locaux subissent une violence quotidienne due à la présence massive, visible et permanente de jeunes dealers-consommateurs de produits psychotropes et de trafiquants plus âgés et organisés, auxquels s’ajoutent des mineurs non accompagnés.
Il en résulte de nombreux et graves problèmes : rixes incessantes ; agressions très violentes entre jeunes, avec des décès ; nombreux vols (bijoux, téléphones, vélos, matériels divers…) ; intrusions ou tentatives d’intrusion dans les locaux et les immeubles ; vandalisme ; incivilités en direction des femmes ; bruit à toute heure du jour et de la nuit ; saleté sur les lieux de regroupement… Tous ces phénomènes sont particulièrement concentrés sur quelques rues du sud du quartier avec des reports sur ce territoire de trafics qui étaient jusque là en périphérie.
Certes, les interventions de la police et des agents de sécurité de la ville de Paris sont plus fréquentes
depuis que nous avons alerté sur la situation et que des rencontres ont eu lieu à ce sujet (avec la Police et la Mairie notamment). Cependant, à ce jour les moyens mis en oeuvre ne nous semblent pas suffisants. En effet, les interventions demeurent ponctuelles, avec peu d’agents au regard des dizaines de délinquants présents ; et une fois les agents partis, le trafic et les troubles reprennent exactement comme avant.
L’indifférence apparente à certains trafics et faits de délinquance, l’insuffisance des interventions ne sont pas comprises par les habitants, qui ont le sentiment d’être abandonnés dans un quartier de non-droit. Ce sentiment s’accroît lorsque depuis deux ans bientôt, la seule supérette du quartier demeure fermée, lorsque l’entrée du métro est interdite les deux jours de marché, lorsque, sans concertation, la poste est fermée, lorsque les pétitions d’habitants, les multiples et diverses interventions auprès des
administrations ne débouchent pas sur des mesures à la hauteur du problème.
Les habitants sont démunis et même les acteurs les plus chevronnés ne se sentent plus capables d’intervenir en sécurité auprès de ces jeunes et moins jeunes, agressifs, sans liens particuliers avec le
quartier et qui ne respectent ni les habitants, ni les commerçants, ni les acteurs sociaux, ni les représentants de la police ou des autres agents de sécurité.
Le quartier est évité par celles et ceux qui le peuvent, les services publics, les associations et les
commerces voient leur fréquentation diminuer, les habitants renoncent aux activités culturelles, sportives mais aussi à l’accompagnement à la scolarité ou aux activités de loisirs éducatifs pour les plus jeunes, autant d’actions et de services déjà fortement impactés par la crise sanitaire. Les associations rencontrent des difficultés à mener leur travail de prévention auprès des habitants, et notamment des plus jeunes.
Nombre d’habitants veulent quitter le quartier et même ceux qui sont les plus en difficulté de logement
refusent de venir s’installer dans ce secteur. Alors que la faiblesse du tissu commercial constitue un
terreau de difficulté, bien peu d’entrepreneurs sont prêts à lancer de nouvelles activités dans un quartier aussi dégradé, alors que la demande existe.
La présence de très jeunes gens, d’enfants de 10 à 12 ans, dans des conditions de vie et des états de santé très préoccupants, qui semblent abandonnés à leur sort et pris sous le joug de bandes organisées, nous alarme depuis désormais plusieurs années et nous ne voulons pas nous y résoudre. Certaines de nos structures, dont ce n’est pas la mission, sont amenées à assurer les premiers secours pour des jeunes gravement blessés. Nous n’ignorons pas l’action de certaines associations mandatées mais aussi les difficultés qu’elles rencontrent et nous demandons qu’elles soient soutenues à la hauteur des enjeux auxquels elles font face.
Si la situation empire depuis le déconfinement, avec l’apparition de nouveaux trafics, de nouvelles
interactions et une densification des regroupements, elle est en germe depuis de nombreux mois. Des
habitants et des acteurs ont déjà alerté à de nombreuses reprises l’ensemble des pouvoirs publics sur ces difficultés sans que l’on observe de réaction proportionnée à la situation. Alors que le quartier a été
identifié comme Zone de Sécurité Prioritaire, territoire “Tous Mobilisés”, on s’interroge sur les priorités et les moyens mis en oeuvre. Les habitants et les acteurs se plaignent d’un manque d’information et sur la volonté des différents acteurs publics de travailler ensemble en impliquant la population. Ils expriment très fortement le sentiment d’être méprisés et abandonnés.
Nos demandes.
Malgré tous ces constats et le découragement qui s’installe parfois, nous ne sommes pas résignés à voir la situation perdurer et s’aggraver. Nous sommes mobilisés et attendons de l’État qu’il joue son rôle pour y mettre fin.
C’est donc au chef de l’État que nous nous adressons en premier lieu. Le problème affectant le quartier
Goutte d’Or sud étant complexe et relevant de domaines multiples, nous adressons également une copie de ce courrier au Premier ministre ainsi qu’aux ministres ayant compétence sur les domaines concernés.
En effet, les interventions nécessaires relèvent à la fois de l’action sociale, de la santé et de l’éducation
(notamment pour la prise en charge des mineurs à la dérive et des consommateurs de drogue de tous
âges), mais aussi de la police et de la justice pour que cessent les innombrables violences, crimes et délits auxquels tout le quartier est confronté.
Il ne nous appartient pas d’aller plus loin en proposant des solutions et nous tenons à rester dans notre
rôle. Nous nous tenons à la disposition des pouvoirs publics pour tout contact dans le but de préciser nos constats. Et surtout, nous sommes demandeurs d’une réponse ainsi que d’une action efficace, visible et durable de la part de l’exécutif.
Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre considération respectueuse.
Signataires
Accueil Goutte d’Or – ADOS – Anneau d’Or – APSAJ – Association Joséphine/Groupe SOS – Café social
Ayyem Zamen – Centre FGO Barbara – Clair et Net – Collectif 4C – Compagnie Gaby Sourire – Droits et
Habitat – Esprit d’Ebène – Goutte Verte – Graine de Jardins – Home Sweet Mômes- Les Enfants de la Goutte D’Or – Les Fermes d’Espoir CFDJ – Paris Goutte d’Or – Salle Saint Bruno – SOS Casamance – Union des Commerçants Chapelle-Goutte d’Or- Xérographes
Copies à : M. Le Premier Ministre, M. Le Ministre de l’Intérieur, M. Le Ministre de la Justice, M. Le Ministre des Solidarités et de la Santé, Mme la Ministre du Travail, Mme la Ministre de la Cohésion des Territoires, M. Le Préfet de Paris.

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